mardi 31 juillet 2012

POUR ÉCOUTER LE SECOND INTERVIEW DE "RADIO GATINE" :
 http://www.radiogatine.com/component/content/article/37-fp-rokstories/372-appel-au-secours-de-christophe-girard-eleveur-de-la-chapelle-bertrand-mars-2012

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 http://www.lanouvellerepublique.fr/Deux-Sevres/Actualite/Economie-social/n/Contenus/Articles/2012/06/09/Le-SOS-de-l-agriculteur-a-un-peu-porte-ses-fruits

POUR LIRE LE DEUXIÈME ARTICLE PARU DANS "LE COURRIER DE L'OUEST" :
http://www.courrierdelouest.fr/actualite/la-chapelle-bertrand-sos-dun-agriculteur-en-detresse-25-07-2012-81302

Indignez-vous... pour rester dignes !


« Communiquer, c'est mettre en commun ; et mettre en commun, c'est l'acte qui nous constitue. Si l'on estime que cet acte est impossible, on refuse tout projet humain. »
(
Petite philosophie à l'usage des non-philosophes)
C'est en m'inspirant de cette phrase d'Albert Jacquard, du livre de Stéphane Hessel et de la situation de Christophe Girard, agriculteur des Deux-Sèvres (cf. la lettre « Au secours, ils sont en train de me tuer ! » que j'ai envie, à nouveau, de crier, de partager, de communiquer avec tous ceux qui peuvent entendre, qui peuvent comprendre.

Indignez-vous criait Stéphane Hessel dans son livre aux éditions « Indigènes » dans la collection « Ceux qui marchent contre le vent »

« Ceux qui marchent contre le vent » expression empruntée aux indiens Omahas (famille des Sioux), des plaines d'Amérique du nord, pourrait bien s 'appliquer aussi aux petits agriculteurs de notre pays qui résistent et luttent « contre le vent » pour exister, pour vivre et pour défendre une certaine idée de l'agriculture, une certaine idée des relations sociales,une certaine idée d'une solidarité renouvelée.

Ils marchent « contre le vent » du consumérisme, des banques, des coopératives, des puissances de l'argent.
Ils marchent « contre le vent » mais, même si le vent est fort, certains ne plient pas, ne baissent pas la tête, parce qu'ils veulent rester dignes et leur dignité est dans leur lutte et pas seulement dans l'issu du combat. Leur dignité est dans leur passion, celle d'une terre propre qui veut nourrir les hommes.
Chaque miette de leur vie, chaque instant de leur souffrance sert à conquérir leur dignité.

« Indignez » est un mot de la même famille que digne, dignité.

Dignité : « Fait que la personne humaine ne doit jamais être traitée comme un moyen, mais comme une fin en soi. »« 


« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. »
Article 1 Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies, le 10 décembre 1948
Il serait temps que ces mots retrouvent tout leur sens !
« Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu'elle ne le refera pas. Mais sa tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde se défasse. Héritière d'une histoire corrompue où se mêlent les révolutions déchues, les techniques devenues folles, les dieux morts et les idéologies exténuées, où de médiocres pouvoirs peuvent aujourd'hui tout détruire mais ne savent plus convaincre, où l'intelligence s'est abaissée jusqu'à se faire la servante de la haine et de l'oppression, cette génération a dû, en elle-même et autour d'elle, restaurer, à partir de ses seules négations, un peu de ce qui fait la dignité de vivre et de mourir. »






En 1957,Albert Camus reçoit le prix Nobel de littérature pour « l'ensemble d'une ?uvre qui met en lumière les problèmes se posant de nos jours à la conscience des hommes. »

Déjà, en 1957, Camus pointait du doigt « des techniques devenues folles », « les médiocres pouvoirs »qui «  peuvent aujourd'hui tout détruire mais ne savent plus convaincre » ou encore
« l'intelligence » qui «  s'est abaissée jusqu'à se faire la servante de la haine et de l'oppression, »

Plus de 50 ans plus tard qu'en est-il ? Les paroles de Camus semblent malheureusement encore d'actualité. Les techniques qu'il évoque sont-elles au service de l'homme ou plutôt pour le profit de certains ? La terre qui est sensée nourrir les hommes est en train de se déshumaniser.


Autre mot qui semble avoir perdu tout sons sens initial :

« La coopérative est une entité économique fondée sur le principe de la coopération. Elle a pour objectif de servir au mieux les intérêts économiques de ses participants (sociétaires ou adhérents) » source Wikipédia
« Une coopérative est une association autonome de personnes volontairement réunies pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux et culturels communs au moyen d’une entreprise dont la propriété est collective et où le pouvoir est exercé démocratiquement. » source Wikipédia
Qu'en est-il aujourd'hui de l'esprit coopératif ? Le profit a supplanté le partage, l'intérêt de quelques-uns est venu prendre la place de l'intérêt collectif. La « propriété collective» n'a t-elle pas été remplacée par le pouvoir de quelques-uns ?
Que font-ils de leur pouvoir si ce n'est de le mettre au service de quelques-uns. Le pouvoir est une force mais peut devenir une violence si on s'en sert pour discriminer, séparer, trier, profiter. Le vrai pouvoir c'est la connaissance, la connaissance et la prise en compte de l'autre, des autres, de tous les autres. Sinon ce n'est qu'un pouvoir de pacotille, un pouvoir de petit chef mais, malheureusement, il ne faut pas sous-estimer le pouvoir de la stupidité humaine. Le pouvoir est moins fort que le vouloir car le pouvoir est éphémère alors que le vouloir, parce qu'il est animé par des convictions, des valeurs, dure dans le temps. Le pouvoir souvent détruit, le vouloir, lui, toujours construit.
Les petits paysans, comme Christophe Girard, veulent sauver ce qui reste de leur métier. Il sont fiers de le pratiquer et leur fierté, dans leur infortune, soutient leur courage et leur donne de la dignité.
Ils marchent contre le vent qui les fait parfois reculer :
« Reculer en faisant désespérément semblant d'avancer. Il n'y a probablement pas de métaphore plus percutante pour définir une époque où l'image de la modernité cache si souvent des formes de régression évidentes. » (Christian Rioux – site LE DEVOIR.com )

Mais n'oublions jamais que le vent change de sens.

Continuons donc de nous indigner pour garder notre dignité. Continuons de nous indigner devant les conséquences désastreuses au quotidien des attitudes de ceux qui ont le pouvoir de l'argent, de la dictatures des financiers. Continuons de nous indigner devant la situation des petits paysans, comme Christophe Girard, qui luttent pour préserver leurs valeurs, leur terre, notre terre.

Soyons le ferment d'  « un esprit de résistance » car comme l'a écrit Stéphane Hessel :
«  Créer c'est résister, résister c'est créer . »


« Désormais, la solidarité la plus nécessaire est celle de l'ensemble des habitants de la terre. » a écrit aussi un autre défenseur de la nature ... et de la nature humaine, Albert Jacquard.

Et pour créer cette solidarité humaine, commençons par respecter la dignité de chacun et faisons nôtre cette phrase de l'Abbé Pierre :

« Aucun homme n’est sans avenir. Toute dépend du regard que l’on porte sur lui » ».


Le 25 juillet 2012
Jacky Prêt